La honte

 

Poème de circonstance ? Poème qui s'impose. Poème nécessaire...

Le 21 avril 2002, des élections avaient lieu, en France. Le résultat, inattendu, se faisait bombe, éclat, brisure.

Un texte devait aussitôt jaillir de cet événement, publié en juin 2002 dans le bulletin de la MAPRA, maison des arts plastiques en Rhône-Alpes, Le bloc-notes :

 

LA HONTE

 

faiblesse faiblesse faiblesse
failles
je suis une fois de plus
la victime l'opprimée la minorité
je suis juive lesbienne arabe
noire tzigane communiste
moi l'exclue la différente je suis lettone je suis d'ailleurs
humaine je suis femme
je suis l'éternelle proie et eux les mêmes bourreaux
frivoles frileux frissons fratricides
ils ont les doigts passés à l'encre intolérance
le coeur fanatisé
peste brune peste sombre
ils ont les bras trempés
dans le sang de l'inhumanité
dans le couloir
de l'hostilité
tous ces cerveaux
c'est si meurtrier
nul rescapé
peste brune
peste sombre
le racisme en bannière
l'exclusion à la boutonnière
c'est la guerre
fossoyeurs négatifs
c'est l'éternelle histoire de ces gens sans Histoire
oranges amères
pépins pour toujours au fond de la gorge
rappelons-leur chaque jour
pluralisme tolérance échanges ouverture et cultures
vive la diversité
qui dure
liberté égalité fraternité rien que des progrès
oranges amères
que vivent les différences que vive l'autre
de toutes les couleurs
sur le grand chariot du bonheur
petites villes bien tranquilles campagnes cités banlieues
une même éternelle histoire
de ces gens sans histoire
pétainistes poujadistes et même apolitiques
oranges amères
voter pour le FN
jamais n'est innocent jamais ne l'était jamais ne le sera
ô pépins
mais ne pas voter
grave aussi
la place leur laisser
il faudrait sans cesse sans cesse le leur bien répéter
faites que cela cesse
NON au FN !
car ne l'oublions pas ne l'oublions jamais jamais
cette idéologie
démagogie sans pédagogie
est farouchement non-citoyenne
follement nocive
fondamentalement négative
furieux nazisme
faiblesse faiblesse faiblesse
failles
fanges nationales fantoches nébuleux fatal néant
nauséabond
fissures néonazies
comment fraternellement résister ?

 

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D'autres textes avaient trouvé leur place sur le site, dans une rubrique aujourd'hui défunte, moins engagés, jaillis au coup par coup : je ne sais pas où les caser, alors hop... allons-y jeunesse, je les abandonne ici...

Ainsi du poème du 14 septembre 2001

automne
les cimes envolées
fumée

le rire bleu de l'été

 

Et celui de juillet 2001 ?

savez-vous ce que l'on raconte
les mailles de l'enfance
tricotées une à une

jouvence

 

Et celui de juin 2001 ?

des cascades plein la tête
le coffre aux souvenirs

déverrouillé

cahiers quadrillés
empreintes engrenages et labyrinthes

portillons de bois
mousses et rochers

ah les grilles rouillées
le charme des lisières des mélopées
toute l'enfance

soudain

retrouvée

Et le poème

du 28 avril 2001 ?

ils riaient


les délicats flocons

accrochés aux pleurs des fruitiers

28 avril 2001


Et celui

du 26 avril 2001 ?

Vive le joli mai
embarqué loin des pins...

 

étranges gouttes

de rosée

roucoulement

des jours infatigués conduisant à l'été

26 avril 2001

 

Et celui du

du 23 mars 2001 ?

 

crocus printemps d'or

au loin
motus

veille l'érable stable

23 mars 2001

 

Et celui du 24 février 2001... ?

 

fragrances atténuées

apaisées les tristesses

 

quand le rouge fredonne

 

24 février 2001