Quelques poèmes

contre la peine de mort

 

Douleur capitale

 

la mort tourbillonnait

les humains
osaient infinie l'injustice

les procès étaient truqués les dés pipés

les couleurs faussées

il fallait témoigner
il fallait protester

brutalité
racisme

de l'autre côté du miroir
couloir inéluctable

c'était l'époque opaque
encore archaïque

où les hommes n'hésitaient point hélas
à légalement tuer

c'était l'ombre c'était l'orage

il y avait des morts
il y avait des silences
les recours les révisions ne connaissaient jamais d'issue

ne surgissaient que vertige
labyrinthe et corridor
de la mort

les voix des sans-voix
confuses malgré elles se taisaient

c'était l'hiver
il faisait froid

qui donc s'indignerait

honteuse

la douleur capitale
l'Humanité décapitait

 

Le poème précédent

comme les suivants,

rédigés par Anne Poiré, pour le comité de soutien à Mumia Abu-Jamal

ont été publiés dans le recueil

Poèmes pour Mumia Abu-Jamal

 

Cet ouvrage contient des textes rassemblés par le collectif de soutien à Mumia Abu-Jamal, Noir, condamné à mort aux Etats-Unis, après un procès arbitraire et politisé.

 

" Le présent recueil est dédié à Mumia Abu-Jamal,

aux 3700 personnes dans le couloir de la mort aux Etats-Unis,

ainsi qu'à tous les condamnés à mort dans le monde."

 

On y trouve quatre reproductions d'encres de Chine de Guallino, ainsi que trois poèmes écrits par Anne Poiré

( Comité de soutien à Mumia Abu-Jamal

chez Viretto et Dieudonné

18 place Jean Jaurès

13 001 Marseille

Tél/fax : 04 91 42 98 47

mumia.marseille@lac.gulliver.fr)

 

Voici la reproduction de l'une des illustrations de Guallino :

 

Douleur capitale

18 X 13 cm

Encre de Chine sur papier

2000

 

Un homme

 

meurtre
ou pas meurtre

peu importe

prémédité ou pas

culpabilité
innocence

peu importe

qu'il soit grand
qu'il soit petit

noir
blanc

peu importe

il est un homme

 

quel est donc cet autre homme qui s'arroge le droit
en n'importe quel nom

de commettre à son tour
quelque affreuse vilenie

par l'étrange loi
légitimé

bas crime très sordide

Tue-tête

fallait-il rappeler
infiniment l'universelle déclaration

tout individu avait droit à la vie
nul ne serait soumis à la torture
ni à des peines ou traitements cruels
inhumains ou dégradants

la condamnation capitale une à une ces règles supérieures violait
elle en bravait les grands principes

c'était scandale illégitime meurtre effroyable les États assassinaient
les États suppliciaient martyrisaient c'était agonie c'était estocade c'était loterie
pour certains la douleur tournoyait

implacable le mal s'amplifiait
déraisonnables et excessifs les hommes légalement tuaient

procès inéquitables partiaux ou non
justes ou faussés

tuer n'était jamais du jeu

électrocutés lapidés décapités asphyxiés empoisonnés battus pendus
brûlés ou fusillés
de sang froid qu'inventaient-ils
l'alternative n'offrait aucun attrait
la faucheuse gagnait

irréversible c'était honte et malheur le pays tout entier saignait

dans le noir les infects corridors de la mort
tenailles ardentes réduisaient l'espérance
immensément rongeaient

chaises électriques chambres à gaz
les méthodes seules différaient la souffrance régnait

parodie ou justice très honnête
la mort inacceptable insoutenable l'emportait

le gouvernement donnait l'exemple
poursuivant sans pudeur sa lourde tâche d'assassin
abjecte boucherie
exécuter épargner
s'accumulaient les procédures
juridictions humainement faillibles

l'on était barbare féroce impitoyable
c'était la loi
l'on se justifiait savamment certains même étaient payés abattaient achevaient
en toute impunité

potence au long squelette
le vent battait les cordes
les corps se balançaient

l'angoisse montait
l'incompréhension la sauvagerie
qui donc en l'animal ouvrait ainsi la porte à l'homme

le public aboyait
le spectateur rugissait
bestial
la lame mordait les crocs s'aiguisaient

geôles closes
cages odieuses
le bruit du levier
le cliquetis des chaînes
le crissement de l'échafaud
le gémissement de qui va mourir
le hurlement de qui va endurer

insupportable silence celui des tortionnaires

des culs-de-basse-fosse
sans avenir sans lendemain sans espoir autre que les os
ils étaient confinés
les carrés cadenassés se refermaient

les larmes les sanglots
les longues nuits au sommeil troublé s'égrenaient
l'épreuve perdurait

la mort au fond de l'horrible couloir guettait

tout pas pouvait mener au bout
gibets
épées spectres effilés
qu'importaient les moyens

ceux qui exterminaient se croyaient purs
leurs mains ensanglantées transpiraient bien pourtant
le résiné dégoulinait gouttait

l'abolition pourrait-elle un jour le sécher

responsable du plus atroce des forfaits la société

respectables les jurés
respectables les juges les bourreaux les policiers
les gazetiers les échotiers
respectables tous les infâmes qui consentaient que giclât le sang se rompît le cou

punition sélective
châtiment disproportionné
les pauvres et les minorités davantage pâtissaient

l'effet dissuasif rien ne le prouvait

l'erreur toujours était possible
leur rendre la vie
irréalisable

eussent-ils été vraiment fautifs fallait-il les briser

officiel c'était fort sombre crime
en comparaison pires délits
minimes devenaient

présumés coupables supposés innocents qui distinguerait
en adoptant la mort c'était sûr
la collectivité préméditait

condamnation capitale
une à une toutes les bases fondamentales
étaient violées

l'universelle déclaration à tue-tête rappelait
que tout individu avait droit à la vie que nul ne subirait la torture
ni des peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants

décisions comme têtes
tout y passait
l'état n'hésitait point à trancher

 

Ce dernier texte

est paru en automne 2000

dans la revue (Cahiers d')Ecritures n°4,

Éditions On @ Faim !

BP 47

76 802 Saint Etienne du Rouvray cedex

 

 

Ces trois poèmes sont publiés
dans le recueil

Poèmes pour Mumia Abu-Jamal

( Comité de soutien à Mumia Abu-Jamal

chez Viretto et Dieudonné

18 place Jean Jaurès

13 001 Marseille

Tél/fax : 04 91 42 98 47

mumia.marseille@free.fr )