Pulpe et murmures, mémoire, un jardinier, Patrick Guallino

 

Le catalogue de l'exposition du Musée de Bègles,

à l'automne 1998, contient ce texte d'Anne Poiré,

sur des tableaux récents de Guallino :

 

Pulpe et murmures, mémoire, un jardinier, Patrick Guallino

Griffures de bleu, dans le jaune élagué.
De cobalt, de soufre, de cyan, de purpurine, de cadmium et serpentine, tendues vers le rivage, - un visage -, parcelles d'absolu. Toujours rebelles. Grattés, sauvages, souples signes, dans le sillage magnétique. Dessous le smalt, encore du jade cru, bouches ciselées, larges gouffres aimables, dans l'écarlate du désir rubis disséminé. En camaïeu.
Soudain l'orangé, tache inattendue, équilibrée, rassurante, nacré d'or, safrané, - presque insoutenable : firmament déchiré, déchiqueté, amarante. Au loin tracés agiles, ardents. Dans l'argile des gravures d'astre aigu et les sphères enroulées autour d'un ton très aconit, des mots illisibles.
Alizarines, incandescentes, pivoines malachites, Véronèse, éclats peints à l'orée du ciel épars, cerclés d'imaginaire, -cocagnes, coquelicots. Se joignent dans l'horizon lavande, - âprement vif-, les molécules de turquoise, la palette des noirs, le spectre du blanc, à l'angle des métamorphoses.
Mêlé aux vapeurs, un ambré sanguin, bavard, se multiplie en indigo chrysalide.
Partout d'exactitude et de justesse, le contour aventureux posé l'oeil fermé, guipures et dentelles, se colore, - traits de feu dans le carmin pulpeux.
Indéterminés, les chemins d'azurite subversifs, les outremers en rase campagne. Traversées de lumières empourprées, de femmes éphémères, lignes à peine suggérées.
Céruléum, jaillit le personnage. Nymphe précieuse aux seins de pervenche d'ivresse, soleils éparpillés en chevelure vermillonnée.
Démasqués, derrière la blondeur vive et son cerne de nuit, énigmatiques symboles chiffrés dans le lointain

 

Mai 1998